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s’offrir aux bombes. Il a fallu 14 mois pour s’en affranchir !

— Parcouru les boulevards entre 10 et 11 heures du soir. L’obscurité, en contraste avec le souvenir illuminé de la paix, oppresse. Foule nombreuse. Seules, les façades de cinéma brillent. Les terrasses de café sont obscures, mais occupées par des gens qui, ainsi tapis dans l’ombre, ont l’air d’attendre quelque chose… Partout où il y a des chaises, des bancs, la foule respire, fait plage.

— Le 20. À Montmartre, je jette un autre coup d’œil. Toujours l’obscurité. Les cabarets classiques et les restaurants nocturnes sont fermés. Encore des cinémas, de petits music-halls. Un grand calme, où éclate le bruit des taxis en marche.

— Tristan continue de se servir de la métaphore du manuscrit pour parler de l’offensive. Et les Allemands ayant paru attaquer, il me demande si le manuscrit n’a pas été traduit en allemand ?

— Une pancarte dressée par les Allemands devant leurs tranchées : « Soldats du Nord, vous êtes tous cocus. Nous couchons avec vos femmes. » Réponse des tranchées françaises : « Nous nous en foutons : nous sommes tous du Midi. »

— Cruppi, ancien ministre des Affaires Étrangères, a fait une tournée en Europe. C’est un homme qui laisse paraître l’opinion favorable que chacun a de soi-même. Il est cordial et savoureux. De l’Italie, il dit que c’était le peuple neutraliste par excellence et que le miracle fut l’emballement provoqué par les Garibaldi, et d’Annunzio. Ces Italiens sont effarés de leur audace et veulent limiter le péril.

De la Grèce, il dit la popularité du roi, beau-frère du kaiser, l’impossibilité pour Venizelos d’agir