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— Cette guerre restera dans la mémoire des hommes comme un déluge de sang et de sottise. À propos des représailles mutuelles exercées sur les villes ouvertes, n’ai-je pas lu en tête de la Presse du 17 juin 1915 cette phrase : « Nous ne leur laisserons pas le monopole de la déloyauté criminelle ».

— Comme tout petit effet de la guerre, on me cite le cas des fleuristes qui donnent en cadeaux à leurs clientes des orchidées rares. Elles n’en ont plus le placement, et comme les fleurs poussent tout de même…

— Pasquet disait que si les deuils semblent atténués, c’est parce qu’on ignore les circonstances de la mort. Il y a là comme une disparition, quelque chose comme une envolée.

— Une dame déclare qu’elle a perdu son mari à la guerre, mais qu’elle est à la hauteur de l’épreuve ; d’ailleurs, il a pu être enterré religieusement. Un auteur dramatique déclare qu’il ne serrera pas la main à ceux qui quittèrent Paris en septembre 1914.

— On donne, à l’examen du brevet élémentaire, une lettre de Poincaré aux soldats, comme dictée. Les candidats doivent, comme question écrite, expliquer la phrase : « Vous rentrerez dans vos foyers illuminés de gloire ». Les trois quarts répondent que les soldats illumineront dans la joie d’être rentrés chez eux.

— 21 juin. Dans le train, j’entends la femme d’un officier aviateur dire pieusement : « Quand on est protégé, on est protégé partout. » C’est la foi catholique, secondant la foi militaire. Ce sont des sœurs jumelles.

Cette dame dit aussi : « Le raid sur Carlsruhe n’est qu’un commencement. » Un gros monsieur confortable dit : « Je l’espère bien. »