pierres millénaires et les Arabes s’écrient : « Ô Allah ! qu’est-ce qui est arrivé ? » — « C’est, répond le Sphinx, que les Allemands veulent conquérir l’Égypte à travers le désert de Libye. Il y a de quoi faire rire même les pierres ! » De même, la campagne de Russie lui paraît un accès de folie. Elle représente un Napoléon regardant à la loupe un tout petit Guillaume II, lilliputien, qu’il a pris dans le creux de sa main : « Et ce pygmée a le toupet de prétendre me remplacer ! » dit l’Empereur, « la seule ressemblance sera que son Waterloo arrivera juste un siècle après le mien. » L’ironie de l’artiste slave est parfois plus amère. Dans un de ses derniers dessins, il montre le Kronprinz, en déshabillé, armé d’une loupe, lui aussi, afin de mieux examiner les objets d’art et les pendules dont il fait l’inventaire. Pourtant, c’est le jour où l’on célèbre l’anniversaire des Hohenzollern. « N’êtes-vous pas encore prêt ? Les invités sont tous arrivés », lui dit son père, en grande tenue, indigné. — « Laissez-moi seul, répond le jeune homme. Au lieu de me réjouir au cinquième anniversaire des voleurs de notre famille, je préfère jouir de la collection que j’ai moi-même réunie, en une seule année, par ma propre industrie. »
Ou bien encore, on voit Mars, dieu de la guerre, devenu un général allemand qui dit à la Mort, un peu lasse de faucher sans cesse : « Dis donc, tas d’os, ne fais pas attention à ce que j’ai dit de mon intérêt pour les Polonais. Coupe-les, fauche-les, sans pitié. Je ne me soucie pas qu’il reste des gens vivants sur