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le Bulletin de Sydney, sur les plages les plus lointaines et aux latitudes les plus diverses, partout où un homme de race anglo-saxonne prend la plume pour tracer un symbole de la Germanie et de la guerre, on se sent au pays de William Blake et de Shakspeare. C’est un jet de lumière sur un charnier ; il éclaire, il frappe, il ne scintille pas et ne joue pas. Ce qui a choqué le plus l’humoriste anglais, dans toute cette affaire, c’est la faillite de la civilisation, la régression de tout un peuple vers les sauvageries et les perfidies animales. La guerre lui fait horreur, mais moins la guerre que la façon dont on la fait. On ne se sent pas en présence d’un pacifiste convaincu, mais d’un loyaliste. Le Français caricature le manque d’élégance, le Hollandais le manque d’humanité, l’Anglais, surtout le manque de bonne foi. Le business man, en lui, ne comprendra jamais qu’un souverain ait pu protester sa signature au bas d’un traité, et le sportif qu’un général ait violé, pour y gagner, les règles du jeu de la guerre. Si l’homme a fait quelques progrès, depuis l’âge de pierre, c’est qu’il s’est entraîné à tenir sa parole et à lutter, lorsque la lutte est inévitable, avec le moins de cruauté possible. S’il l’oublie, il retourne instantanément à la condition de l’anthropopithèque. Les progrès dont il se sert n’y font rien. Il ne sera pas moins un gorille parce qu’il connaîtra les propriétés de la nitroglycérine ou de la balistite, qu’aux jours lointains où il se saisissait d’un quartier de roche et emmanchait à quelque