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turcs, avaient coutume, au xxe siècle de pousser des cris effroyables pour épouvanter l’adversaire. Mais nous, nous savons qu’il ne s’agit pas des Prussiens…

Si les civils, chez nous, en ont pris pour leur grade, les soldats ont été abondamment célébrés par les humoristes. L’heure de la justice a sonné pour eux, en même temps que l’heure du sacrifice. Et l’éloge décerné par un railleur de profession a une saveur que les autres n’ont pas. Il semble arraché, par l’évidence du mérite, à l’esprit critique défaillant sous l’émotion, mais demeurant l’esprit tout de même. En réalité, ceux qui savent le mieux couper sont aussi ceux qui savent le mieux coudre, qu’il s’agisse de réputations ou de dynasties, de manteaux de cour ou de lauriers. « Merci père La Victoire ! » s’écrie une cantinière de M. Willette, se jetant au cou du général Joffre. C’est que le vieil homme de guerre lui apporte une statuette dorée, au soir d’une journée d’orage. Et cette statuette est celle de la Victoire avec les ailes, et elle semble être sortie des volutes de fumée d’un 75 et la cantinière a le bonnet de la République, et l’arc-en-ciel est aux couleurs de la France… Le symboliste ému qu’a toujours été M. Willette, du temps où il conduisait la farandole de ses Pierrots, sous les moulins et la lune de Montmartre, a trouvé encore une très belle image pour figurer ce que la France doit à son armée. Cela parut en 1914 et cela s’appelait Les Semailles. Dans un vaste champ