Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/140

Cette page a été validée par deux contributeurs.

geant, plusieurs purent reprendre leur crayon et les journaux satiriques leur publication, il semble que le désir de se détendre, de distraire, un instant, les yeux et l’esprit des horreurs du massacre, de l’ambulance et des mutilations, l’ait emporté sur le goût de stigmatiser l’envahisseur.

La matière n’était pas, non plus, excellente. La raillerie n’a de prise que sur la faiblesse ou ce qui est faible dans la force, jamais sur la force même. L’odieux est un bloc où l’ironie ne peut mordre. Ce qui prête, parfois, à l’erreur sur ce point, c’est qu’on confond le motif déterminant de l’attaque avec cette attaque même et ses moyens. Il est vrai que souvent des hommes d’esprit ont été déterminés à user de leur arme par l’indignation que leur a causée l’excès de la force. Mais ils ont senti leur arme s’émousser sur du granit, et l’on ne saurait citer un bon trait qui ait porté. Si, parfois, ils ont réussi à pousser leur pointe ironique, c’est que le granit avait un défaut, quelque fissure : par exemple, l’hypocrisie, — c’est-à-dire une faiblesse, ou l’infatuation, — c’est-à-dire une autre faiblesse. Et comme, souvent, en effet, le crime triomphant a de ces faiblesses, qu’il se masque d’hypocrisie ou se drape d’infatuation, il est vulnérable et l’esprit fait son œuvre. Mais la brutalité triomphante ne l’est point.

Au vrai, nos maîtres de la caricature ont fait des planches excellentes sur la guerre ; mais, si l’on y prend garde, les meilleures ne sont pas sur les Alle-