Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/134

Cette page a été validée par deux contributeurs.

c’est qu’ils s’adressent à un grand nombre de facultés, outre le sens du ridicule. L’humoriste cherche à éveiller et à diriger votre amour, votre compassion, votre bonté, votre mépris du mensonge, de la prétention, de l’imposture, votre tendresse pour les faibles, pour les pauvres, pour les opprimés, les misérables… » Thackeray, qui ne prévoyait pas la guerre actuelle, explique ainsi pourquoi, sans rien abdiquer des sentiments de tristesse ou d’indignation qu’elle suscite, on peut consulter ses caricatures.

Ce qu’on y trouvera, ce ne sont sans doute point des faits, comme dans les photographies ou les dessins des champs de bataille, mais bien les sentiments des peuples sur ces faits. Ce qu’on y saisira, ce ne sont point des réalités, mais l’image que les artistes et leur public se font des réalités et aussi des sentiments de leurs amis et de leurs adversaires. Ainsi envisagée, la caricature projette une vive lumière sur le grouillement complexe et confus des passions, des espérances et des craintes, éparses dans la subconscience d’une nation.

D’abord, elle résume. En tirant de tous les traits qui composent une figure le seul trait qui marque sa dissemblance d’avec l’espèce, le caricaturiste nous découvre le caractère propre à l’individu et, par là, nous résume le visage. De même, en faisant tenir, dans le cadre étroit d’un dessin et le geste de deux ou trois personnages, tout un événement contemporain, ou une théorie sociale, un système poli-