droite tient le peigne, ou plutôt le couteau de bois qui la tassera. Derrière elle, une nichée d’anges ; devant elle, des prophètes ; au-dessus d’elle, Dieu le Père, ne font que des gestes vagues d’admiration, d’adoration ou de bénédiction. Les licornes, dressées sur leur train de derrière, ont une attitude aussi parlante que les deux prophètes ; les perroquets et les faucons sur le bord des fontaines jouent un rôle aussi précis que les anges : un rôle purement décoratif. La Légende dorée nous dit que la Vierge, élevée dans le Temple, « croissait tous les jours en sainteté, visitée par les anges et admise à la vision divine, qu’elle s’était imposé pour règle de rester en prière depuis le matin jusqu’à la troisième heure, et ensuite de la troisième à la neuvième, de tisser de la laine, après quoi elle se remettait en prière, jusqu’au moment où un ange venait lui apporter sa nourriture. » Nous le voyons ici, mais nous voyons surtout autre chose. Nous voyons un paysage décoratif, une fête ordonnée pour le plaisir des yeux. L’artiste a supprimé le temple, ou l’a réduit aux deux colonnes ornementales qui lui étaient nécessaires pour tendre sa tapisserie et pour supporter les armoiries inévitables de Monseigneur. Et, profitant de ce qu’un des emblèmes de la Vierge est l’ortus conclusus, au lieu de la mettre dans le Temple, il l’a mise dans un jardin. C’est le jardin selon le cœur du Moyen âge, le jardin d’Albert le Grand, de Jean de Garlande, du Roman de la Rose, bien clos, à l’abri des incursions du dehors, régu-
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