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Hermann s’arrêta.

— À qui donc est cette maison ? demanda-t-il au soldat de police du coin.

— À la comtesse ***, répondit le soldat.

Hermann tressaillit. L’anecdote merveilleuse lui revint à l’imagination. Il se mit à faire les cent pas devant la maison, en songeant à la bârinia et à son magique secret.

Tard il rentra dans son humble logis; de longtemps il ne put s’endormir, et quand le sommeil s’appesantit sur lui, un rêve lui montra les cartes, la table grise, des liasses de banknotes et un monceau de ducats. Il battait les cartes, jouait hardiment et gagnait sans cesse, entassant l’or devant lui, mettant les bank-notes dans sa poche.

Il se réveilla assez tard, et la perte de sa fortune chimérique lui arracha un soupir. Il s’en fut de nouveau errer par la ville, et de nouveau se trouva devant la maison de la comtesse ***. Une force mystérieuse semblait l’entraîner vers la maison. Il s’arrêta et se mit à regarder les fenêtres. À l’une d’elles il aperçut une mignonne tête aux cheveux noirs inclinée sans doute sur un livre ou sur un ouvrage. La tête mignonne s’étant relevée, Hermann distingua un petit visage frais et des yeux noirs. Cette minute décida de son sort.