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au redouté Lecteur de me nommer, ſelon le juſte droit qu’il en a acquis en m’achetant, je dédie mon Eloge de RIEN à PERSONNE. Je ne doute pas qu’une pareille Dédicace ne révolte bien des gens, qui accoutumez à n’approuver que leurs propres inventions, ont toujours des diſpoſitions prochaines à blâmer celles des autres. Que cet Auteur fantaſque, diront ces Cenſeurs pointilleux, entend mal ſes intérêts ! N’auroit-il pas incomparablement mieux fait de dédier ſon Ouvrage de RIEN à un Homme de quelque choſe, que d’en offrir la Dédicace à PERSONNE ; Dédicace auſſi infructueuſe que ridicule, & dont un RIEN des plus ſecs ſera toute la récompenſe ? Il eſt vrai que peut-être un Seigneur que j’aurois héroïfié à tout haſard dans mon Epître dédicatoire, m’auroit régalé d’un je vous remercie bien articulé, & de quelque embraſſade un peu vive, ou qu’une belle Iris dont j’aurois vanté le mérite équivoque à la tête de mon Livre,