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LA FILLE

rendus plus terribles par l’horreur de sa situation actuelle.

— Oui, dit Mme La Troupe en maîtrisant aussi vite que possible son émotion, je l’ai bien connue en effet ; mais, pour en revenir à votre demande, je vous assure qu’il m’en coûtera beaucoup de laisser aller ma petite fille ; d’ailleurs, voyez-vous, elle me sert beaucoup ici, je n’ai qu’elle ; au reste j’y penserai de nouveau et je donnerai ma réponse à maître Jacques lui-même.

— C’est bon, c’est bon.

— Et comment va-t-elle, la petite Helmina ?

— Pas trop ben, j’vous assure ; c’est justement pour elle que je viens chercher des remèdes ; et puis, entre nous, je vous dirai qu’elle est bêtement amoureuse.

— Et de qui donc ?

— Dame, de qui donc ? il faut qu’ça soit d’un de ces deux muffles-là, car elle a dit à ma femme qu’elle avait rencontré son bijou ici, et vous venez de me dire qu’ils y étaient lorsqu’elle est venue.

— Voilà du farceur, dit Mme La Troupe.

— Vous sentez ben, madame, qu’il est de mon devoir d’avertir son père.

— Vous feriez bien certainement.

— Et cependant j’vous assure qu’ça me coûte furieusement : c’est une si bonne enfant, et son père est si curieux ; croirez-vous qu’il ne veut pas entendre parler de mariage du tout pour sa fille ? et, entre nous, Mme La Troupe, dit Maurice en s’approchant de l’oreille de l’hôtesse, j’vous avoue qu’il a d’bonnes raisons, allez ! pour dissuader sa fille des épousailles… Mais voyez donc comme j’m’amuse, moi qui devais être de retour chez moi avant minuit. Ainsi donc, ajouta-t-il en sortant du salon, vous penserez à…

— Oui, oui, dit Mme La Troupe en le reconduisant.

— Bon ! je r’viendrai goûter à votre gin ; j’ai d’s’affaires à régler sur le marché demain à dix heures, j’entrerai en passant,