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Sa poésie nationale, que les législateurs du Parnasse se faisaient gloire de ne pas connaître, prend dans nos sympathies, dans nos études, dans notre admiration une place de plus en plus grande, et il y a longtemps que Roland à Roncevaux a remplacé Achille dans l’imagination de la jeunesse qui chante et qui rêve.

Tout, en un mot, notre foi religieuse et nos idées politiques, notre nationalité et notre langue, notre esthétique et notre économie sociale, tout nous est commun avec le moyen âge et nous sépare de l’antiquité. Nous sommes ses héritiers ; l’œuvre que nous continuons, c’est la sienne et non celle de la Renaissance.

Et s’il y a une époque qui mériterait le nom de moyen âge au sens étymologique du mot, n’est-ce pas précisément la Renaissance elle-même, qui a ouvert dans l’histoire des peuples modernes une parenthèse aujourd’hui fermée ou sur le point de l’être ? Les idoles de la Renaissance ne sont-elles pas détrônées aujourd’hui, et ne nous éloignons-nous pas de son idéal autant que possible ? Nous ne voulons plus de l’absolutisme royal, ni de la centralisation qui en est la suite ; nous répudions avec énergie le fameux principe du XVIe siècle : Cujus regio ejus religio,