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date, mais qui remonte au mois d’octobre de cette année, et dans laquelle il est également question de ses Nibelungen, dont il venait à peine de terminer les deux premières parties : l’Or du Rhin et la Walkyrie. Il allait entamer la composition du troisième drame de ce grand ouvrage : Siegfried. C’est à ce propos qu’il parle à Liszt de Tristan[1].

« Pour satisfaire au plus beau rêve de ma vie pour l’amour du jeune Siegfried, il faudra bien que je termine mes Nibelungen : la Walkyrie m’a coûté trop de peine pour que je ne me donne pas cette satisfaction. J’en suis à la seconde moitié du dernier acte de la Walkyrie. Je ne pense pas pouvoir terminer le tout avant 1856. En 1858, – la dixième année de mon hégire, – je ferai représenter le tout, si c’est possible. Mais, comme en ma vie, je n’ai jamais goûté le véritable bonheur de l’amour, je veux encore élever un monument à ce plus beau de tous les rêves, une œuvre dans laquelle l’amour, du commencement à la fin, aura son entier assouvissement. J’ai dans la tête un Tristan et Iseult, la conception musicale la plus simple à la fois et la plus surabondante ; sous le « pavillon noir » qui flotte à la fin, je m’ensevelirai ensuite pour – mourir. »

Ce n’est cependant que trois années plus tard, dans l’été de 1857, que Wagner aborda définitive-

  1. Voir la Correspondance de Richard Wagner avec Liszt et avec ses amis Uhlig, Fischer et Heinemann, publiée par les soins de sa veuve, en trois gros volumes. (Leipzig, Breitkopf et Hærtel.) J’ai publié une analyse détaillée de cette correspondance dans le Guide Musical, année 1887-88.