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sentons les forces de la nature comme des individualités sensibles, intelligentes, mues par l’amour ou par la haine, se laissant fléchir aux prières, aux offrandes, aux sacrifices. Telle est l’origine de la religion et des religions. Si elles ont, dans le cours des siècles, exercé une incontestable action sur l’éducation morale des hommes, elles n’ont fait, en cela, que rendre aux hommes ce qu’elles en avaient reçu.

Leur fondement est la compréhension plus ou moins claire de la vie, interprétée et révélée par l’Art ; elles se développent ensuite parallèlement à la civilisation, c’est-à-dire à l’affinement nécessaire des relations sociales. C’est l’inverse exactement de la thèse de Tolstoï : les religions ne précèdent pas la marche de l’humanité vers un état supérieur, elles en sont la conséquence. Elles sont si peu initiatrices que, toutes, elles ont été plus ou moins une cause d’arrêt et de recul, bien loin d’être un instrument de progrès. « L’homme, a dit Channing, croit ce qu’il peut, non ce qu’il veut. » Ceux qui voient au delà de ce que nous voulons, ce sont les rêveurs, les