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Combien de nos musiciens pratiquants sont capables de comprendre le rythme autrement que mesure par mesure ? Combien se rendent compte que le rythme n’est autre chose qu’un rapport de proportions qui se reproduisent, se combinent, s’opposent les unes aux autres, absolument comme les mouvements du corps humain ou de tout autre corps animé ? Faut-il s’étonner, après cela, du nombre incalculable de pianistes, d’instrumentistes, de chanteurs qui lisent, jouent ou chantent la musique mesure par mesure, mécaniquement, sans soupçonner même le sens supérieur que le rythme comprend en lui-même à côté de son sens étroit, sans percevoir l’organisme qui se constitue par la répétition, si l’on peut ainsi dire, des molécules rythmiques !

C’est pourquoi il est de la plus haute importance d’insister sur la place que le rythme occupe dans l’ordre des phénomènes constitutifs de la musique. Notre art actuel souffre d’anémie, mais non, comme le pense Tolstoï, à cause du manque de nouveauté des sujets ; il n’est pas menacé, comme le pense Nietzsche, parce que les