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paroxysme de la passion. Elle commence avec les sons vagues et informes que murmure le nouveau-né pour manifester sa joie d’être, et elle ne s’arrête qu’au cri rauque que nous arrache la douleur, la colère ou l’effroi. Toute la gamme infiniment graduée de nos émotions appartient à son domaine ; elle est la manifestation la plus spontanée, la plus directe de ces vibrations dont parle Herder.

Voilà le phénomène primordial. Pour passer de cet état primaire à la dignité d’art, le chant doit subit un développement analogue à celui du langage ; comme ici les sons articulés ont peu à peu formé des mots et les mots des phrases, ainsi les sons musicaux, juxtaposés, animés par le rythme, ont formé des mélismes qui, à leur tour, ont formé des mélodies. La variété de ces combinaisons de sons musicaux est aussi infinie et inépuisable que celle des combinaisons de voyelles et de consonnes dont se compose le langage.

Non moins variée est la signification qui s’attache à ces mélismes, dont le sens, en apparence indéfinissable, n’est pas cepen-