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Dans le chapitre où il écrit ce qu’on vient de lire, il ajoute :

« Lorsque nous étions encore enfant, nous avons goûté pour la première fois le miel de beaucoup de choses ; jamais plus le miel n’a été aussi doux ; il nous incitait à la vie, à la vie la plus longue, sous les apparences du printemps, des premières fleurs, des premiers papillons, de la première amitié. En ce temps-là, – c’était peut-être vers notre neuvième année, – nous entendîmes la première musique, la plus simple, la plus puérile, qui n’était pas beaucoup plus qu’une continuation des chants de nourrice et des airs de joueurs d’orgue. (Il faut, même pour les plus élémentaires manifestations de la musique, subir une préparation, avoir appris ; il n’y a pas d’effet direct de l’art, en dépit des belles choses que les philosophes ont dites à ce sujet.) Vers ces premières délices musicales, – les plus fortes de notre vie, – se reporte notre sentiment quand nous entendons ces mélismes italiens : la félicité de l’enfance, la perte de l’enfance, la conscience de ne pouvoir y revenir et d’avoir perdu ce bien