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riche et sévère, dit-il par exemple, il est des heures où l’on sera subjugué, magiquement remué et presque transformé par son contraire ; je veux dire par ces simples mélismes d’opéra italien qui, malgré leur uniformité rythmique et leur puérilité harmonique, semblent quelquefois chanter vers nous comme l’âme même de la musique. Que vous l’avouiez ou non, pharisiens du bon goût, c’est ainsi ! »

Ici, le parti-pris antiwagnérien l’aveugle manifestement ; les « mélismes d’opéra italien » auxquels Nietzsche fait allusion ne sont pas le contraire de la musique riche et sévère ; ils sont simplement la pauvreté mélodique, la vulgarité, la platitude, la banalité, le clinquant, le boursouflé, le creux, la quintessence même du mauvais goût, et c’est pourquoi ils ont si vite disparu, sans aucune chance de jamais reconquérir leur vogue passée. Nietzsche, lorsqu’il énonce cette singulière préférence pour les « mélismes d’opéra italien », commet d’ailleurs une étrange confusion ; il mêle deux ordres d’idées qui n’ont rien à voir ensemble au point de vue esthétique.