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avec une moralité analogue. – Faut-il cependant, cela posé, contester aux tard-venus le droit d’animer les œuvres anciennes suivant leur âme ? Non, car c’est seulement en leur donnant notre âme qu’elles acquièrent le pouvoir de continuer à vivre : c’est notre sang qui les fait parler à nous. Une exécution fidèlement historique paraîtrait un langage fantômal s’adressant à des fantômes. Ce n’est pas honorer les grands artistes du passé que de laisser craintivement chaque mot, chaque note à la place où ils furent mis ; on les honore beaucoup mieux en s’efforçant de les rendre toujours de nouveau à la vie. Naturellement : supposé que Beethoven reparût tout à coup et qu’il entendit une de ses œuvres rendues suivant le plus moderne sentiment et l’affinement qui fait la gloire de nos maîtres de l’interprétation, très probablement il demeurerait longtemps muet, incertain s’il doit lever la main pour lancer l’anathème ou pour bénir ; à la fin, il parlerait peut-être : « Soit ! soit ! Ce n’est pas moi et ce n’est pas cependant contraire à moi, c’est un troisième, – il y a quelque chose