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malaise en face des œuvres plus anciennes, parce que chaque art augmentant sans cesse ses facultés d’exprimer des états d’âme plus mouvementés, plus délicats, plus précis, plus passionnés, les maîtres nouveaux sont gâtés par ces procédés et en arrivent facilement à croire que leurs prédécesseurs n’ont pas eu en leur pouvoir tous les moyens de faire parler clairement leur âme, et même qu’ils ont pu manquer de procédés techniques ; alors ils éprouvent la tentation de compléter ces maîtres, – car ils croient, dit-il, à l’égalité et même à l’unité des âmes. Et il ajoute :

« En réalité, l’âme de ces maîtres d’autrefois était une autre âme ; plus grande peut-être, mais plus froide et encore éloignée de la vie surexcitée : la mesure, la symétrie, le mépris du charmant et du sensuel, une inconsciente âpreté, la fraîcheur matinale, l’horreur du passionné comme si leur art en eût dû souffrir, – voilà ce qui constitue le sentiment et la moralité de tous les maîtres anciens, qui choisissaient et spiritualisaient non pas arbitrairement, mais nécessairement leurs moyens d’expression,