Page:Kufferath - Musiciens et philosophes, Tolstoï - Schopenhauer - Nietzsche - Wagner.djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
– 242 –

Plus loin encore, Nietzsche consacre quelques lignes à la question du style. Le passage est à citer :

« À quoi reconnaît-on toute décadence littéraire ? À ce que la vie n’anime plus le tout. Le mot devient souverain et ressort dans la phrase. La phrase l’emporte sur la page et en obscurcit le sens, la page devient vivante aux dépens du tout, le tout n’est plus un tout… La vie, la vibration et l’exubérance de la vie sont refoulées dans les plus petits organes, le reste est pauvre de vie. Veut-on admirer Wagner, qu’on le contemple à l’œuvre : comme il sépare, comme il obtient de petites unités, comme il les anime, comme il les fait ressortir, comme il les rend visibles ! Mais à cela s’épuise sa force : le reste ne vaut rien… Wagner n’est digne d’admiration, n’est aimable que dans l’invention de ce qu’il y a de plus menu : la conception des détails. On a toute raison en ceci de le proclamer un maître de premier rang. Il est notre plus grand miniaturiste en musique, il condense dans le plus petit espace une infinité de sens et de douceurs. La richesse en couleurs, en