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nous le montre prêtant un langage à tout ce qui, avant lui, était resté muet dans la nature, pénétrant au fond des phénomènes de l’aurore, de la forêt qui bruit, du nuage qui passe, de la colline qui s’éclaire des rayons du soleil, de la nuit qui rêve aux pâles rayons de la lune, découvrant partout le désir secret des éléments d’avoir une voix et leur donnant cette voix qu’ils cherchaient.

« La musique, avant Wagner, dit-il, avait un champ limité, elle s’en tenait aux éclats intérieurs permanents de l’homme, à la joie, à la tristesse, à ce que les Grecs appelaient l’éthos ; c’est seulement avec Beethoven qu’elle avait commencé à vouloir exprimer aussi le pathos, les états mobiles, les crises de la passion, les mouvements dramatiques de l’âme. Mais comme l’art de Beethoven avait à se dégager des lois et formules consacrées de l’ancienne musique, comme il avait en quelque sorte besoin de se justifier devant elles, son œuvre avait encore gardé quelque chose d’embarrassé et de peu clair. L’expression complète et libre des crises de passion intérieure réclamait des