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la personne de Tristan et d’Iseult ; leur portée poétique et dramatique leur vient non d’eux-mêmes, mais de ce que chante l’orchestre ; c’est de la symphonie qu’ils reçoivent leur véritable signification, ils n’influent pas sur le sens de celle-ci.

C’est dans ce sens, évidemment, que Wagner a pu dire très justement un jour de ses Maîtres Chanteurs que c’était là une vaste symphonie dramatique ; on dirait mieux encore une symphonie dramatisée. Nietzsche, qui pendant de longues années fut en quelque sorte le disciple le plus fervent de Wagner, qui put l’observer de près de son regard pénétrant de philosophe et d’analyste, qui dut chercher à se rendre compte du phénomène hautement intéressant qu’il avait sous les yeux, n’aurait certainement pas conçu sa thèse si hardie et si nouvelle sur la tragédie antique, sans les suggestions de celui qu’il considérait à ce moment comme un génie exceptionnel et sans égal.

En s’attachant à expliquer esthétiquement et philosophiquement Eschyle, Sophocle et Euripide, c’est Wagner qu’il