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sant ses partitions sans se rendre compte de l’étroite relation de la forme musicale avec les nécessités du drame, ne parvenaient à y reconnaître qu’un assemblage surprenant et incompréhensible de beautés admirables et d’agrégations de thèmes échappant à toute logique musicale, en un mot, simplement monstrueuses. Coupez en deux cette totalité qu’est l’œuvre de Wagner, il ne vous restera nécessairement que deux tronçons dont aucun n’est une œuvre d’art complète et parfaite en soi. Poète-musicien, c’est comme tel qu’il faut le comprendre, c’est la seule façon de concevoir sa personnalité double.

Le mystère de cette dualité dans l’unité demeurera toujours un phénomène insondable. Déterminer la part exacte qui revient au pète et celle qui appartient au musicien, aucune analyse, si subtile soit-elle, ne le pourrait. Mais cette impossibilité ne doit pas nous empêcher de reconnaître le caractère spécifiquement musical du génie de Wagner.

Serait-il le prodigieux artiste qu’il a été s’il n’y avait eu en lui le musicien ?