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Sans m’attarder à cette explication, je veux me borner à une observation accessoire de Nietzsche qui n’est pas sans intérêt : à savoir que de l’apparition de Socrate date la décadence de la tragédie, parce que l’homme théorique, l’homme scientifique a détruit la vraie musique, celle en laquelle se perpétue le mythe et qui exprime l’essence des choses. Pour l’homme socratique, la musique est un art d’imitation ; il l’abaisse à n’être plus qu’une vaine et stérile recherche d’effets extérieurs : elle devient de la peinture musicale ; elle veut traduire ce que disent les paroles ; elle veut reproduire tous les objets qu’imitent les autres arts ; elle est un calcul de l’intelligence et de la réflexion, et non l’expression spontanée et nécessaire de ce qu’il y a de plus intense et de plus profond dans le sentiment humain.

Ce qui me séduit dans cette observation, c’est qu’elle semble fournir une explication philosophique, très subtile, je le veux bien, mais néanmoins très plausible, de l’état étrange de l’art musical au moyen âge.