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nous manque la musique qui en était l’élément essentiel, car la Musique a précisément le pouvoir, qui fait défaut à la parole, d’exalter notre sensibilité de telle sorte qu’elle s’identifie avec les sentiments permanents, immuables, éternels dont le mythe est l’expression symbolique. Imaginez les tragédies d’Eschyle et d’Euripide accompagnées de musique, imaginez les grands sentiments qu’elles expriment portés, grâce à la faculté de généralisation de la Musique, à leur absolue puissance expressive, et vous comprendrez ce que les historiens du théâtre antique nous rapportent au sujet de l’exaltation, du délire esthétique où ces tragédies jetaient des auditoires de plusieurs milliers de spectateurs.

Le tragique, en tant qu’il trouve son expression dans la légende, dans le mythe, a donc besoin de la Musique pour se révéler à nous dans son entière vérité.

Ce qui amène Nietzsche à cette conclusion : que la tragédie ne se comprend pas sans musique, que le tragique est au fond d’essence absolument musicale.

Il est curieux d’observer que cette thèse,