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pour nous révéler des lois générales. En s’attachant à reproduire avec exactitude et fidélité des faits accidentels, la prétendue tragédie historique perd de vue ce qu’il y a de sourd, de continu, de fatal dans l’action anonyme de la Nature, elle passe à côté de ces influences inexprimées, de ces lois inéluctables que subit l’humanité inconsciente, et que vainement elle cherche à tourner.

Tout au contraire, le mythe – et c’est ce qu’il y a de supérieur en lui, – met en un relief saisissant le sens universel des actions humaines, en plaçant ses personnages fictifs au-dessus des contingences de la réalité brutale, dans la réalité plus vraie de la vie intégrale, conçue dans sa totalité et sa plénitude idéales ; il nous transporte dans l’atmosphère de la conscience du malheur de l’existence, il nous la révèle ; et c’est de l’apercevance de cette fatalité, de l’inéluctable nécessité de la Douleur et du Mal dans le monde, que naît la profonde tristesse, la souffrance résignée qui est la source de ce que nous appelons l’émotion tragique.