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spectacle de la nature ou d’une action humaine, il accroîtra à l’infini la force expressive du texte ou du drame et sera profondément émouvant.

C’est sur ces observations si justes et si profondes de Schopenhauer que Nietzsche établit toute sa théorie de la renaissance de la tragédie dans le Tondrama de R. Wagner.

Quel exemple plus complet et plus frappant des phénomènes ici analysés pourrions-nous proposer, sinon Richard Wagner ? Il est à la fois poète et musicien. Chez lui, il n’y a pas subordination de la musique à la parole ou à une vision réelle déterminée. L’impulsion musicale n’est pas accidentelle, elle n’est pas le résultat d’une excitation poétique venue du dehors ; elle est spontanée, fondamentale, continue et essentielle. L’idée poétique chez Wagner est musicale en soi, et lui-même nous l’a dit très clairement[1] : « L’œuvre la plus complète du poète devrait être celle qui, dans son entier achèvement, serait une musique parfaite. »

  1. Voir la lettre à Fredice Villot, préface des Quatre poèmes d’opéra.