Page:Kufferath - Musiciens et philosophes, Tolstoï - Schopenhauer - Nietzsche - Wagner.djvu/157

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
– 151 –

qu’il corroborait la pénétrante analyse du philosophe de Francfort.

Nietzsche cite un mot de Schiller qui n’est pas moins intéressant. Le poète de Souabe avoue que chez lui, l’état préparatoire à l’acte poétique ne consistait pas en l’évocation d’images reliées entre elles par la causalité ordonnée des pensées, mais dans une sorte de disposition musicale. « L’impression, écrit-il, est d’abord chez moi sans objet précis et clair ; cet objet ne se dessine que plus tard. Il est précédé par une sorte de situation d’esprit musicale, à laquelle seulement succède l’idée poétique. »

C’est précisément ce que nous retrouvons dans le phénomène lyrique de l’antiquité qui nous montre l’union naturelle, l’identité même du poète et du musicien. Notre lyrique moderne, comme le dit spirituellement Nietzsche, comparée à la lyrique antique, ressemble à une statue de dieu sans tête. Le lyrique ancien réunissait en lui les deux instincts créateurs, l’apollinien et le dyonisien : le dyonisien, c’est-à-dire l’exaltation qui l’identifiait