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avec une intensité singulière, que Wagner est si grand et qu’il prend place au premier rang parmi ceux que l’humanité doit honorer comme ses bienfaiteurs.

Je puis d’autant moins pardonner à Tolstoï de l’avoir méconnu, que s’il est, dans ce siècle, un artiste dont l’œuvre possède la contagion artistique, c’est bien Wagner ! Son œuvre réunit précisément en elles les trois conditions dont dépend, selon le philosophe russe, le degré de contagion de l’Art, à savoir : 1o la nouveauté des sentiments exprimés ; 2o la clarté dans l’expression de ces sentiments ; 3o la sincérité de l’artiste, c’est-à-dire l’intensité plus ou moins grande avec laquelle il éprouve lui-même les sentiments qu’il veut communiquer aux autres hommes. Ces trois conditions, Tolstoï le reconnaît, se réduisent en réalité à la dernière, c’est-à-dire à la sincérité, car c’est elle qui est la source de l’originalité des impressions et de la clarté d’expression. S’il en est ainsi, quelle œuvre, je le demande, pourra-t-on encore considérer comme étant de l’art dans le sens élevé du mot, si l’on exclut Wagner