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entre lui et nous, que nous perdons la notion de l’espace, du temps et même le sentiment de notre individualité, celle-ci étant momentanément confondue dans la perception de l’Être.

C’est dans ce sens que Wagner a pu voir dans l’Art un élément libérateur, c’est-à-dire un élément susceptible d’arracher passagèrement l’homme à la Réalité, de l’élever par delà les sensations purement physiques de la vie matérielle à la contemplation de la vie idéale, au sentiment de la généralité, à la vision du monde absolu, intégral dont il n’est lui-même qu’une manifestation passagère. Pour Wagner, la vie, le monde, l’univers, tout ce qui respire et ce qui vit est l’activité d’une même Substance, partout identique en dépit de l’infinie variété de ses manifestations. (Cette substance identique, c’est l’Idée de Platon, la Volonté de Schopenhauer.) Or, la merveille de l’art est précisément de nous faire sentir notre union substantielle avec l’univers ; il nous révèle sans que nous nous en rendions compte, l’unité de l’Être, l’identité de la substance vitale. L’art nous