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cantabile qui s’y rattache ; enfin la chaîne des trilles lui servait à ramener définitivement le mouvement initial du thème des Maîtres qui éclate finalement dans tout l’orchestre, superbe, puissant, comme une sorte d’apothéose formant poétiquement et musicalement la conclusion naturelle de cette préface instrumentale.

Le plan de cet important morceau est, on le voit, très simple. On y distingue d’abord l’opposition symétrique de quatre thèmes différents qui se rapportent aux deux éléments en présence dans l’œuvre dramatique : d’un côté la scolastique, de l’autre le lyrisme ; ce second élément se développe ensuite librement, pour être refoulé bientôt de nouveau par la raideur académique, qui toutefois est vaincue à son tour, laissant s’accomplir l’union des deux éléments d’abord opposés. En quelques pages de musique nous assistons ainsi au développement complet de la lutte, du conflit qui fait le sujet de la comédie.

Mais si ce plan est très clair, très rationnel, en revanche, la contexture musicale de cette admirable page symphonique est d’une délicatesse et d’une subtilité peu communes. Le travail thématique en est particulièrement intéressant et d’une exécution d’autant plus difficile que Wagner multiplie les indications expressives et suspend ou retient, à tout propos, le mouvement général de l’orchestre malgré la continuité de la figuration. Cependant dès lors que le sens des différents thèmes sera bien connu, l’accent qui leur est propre bien saisi, l’ouverture marchera toute seule. Il est arrivé même que cette page, naguère sifflée à outrance, proclamée incompréhensible et qui devait l’être en effet dans sa nouveauté, les chefs d’orchestre n’ayant aucune idée du sens de ce