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SÉRÉNADE

À Stéphane Mallarmé.

La Nuit, gracieuse et farouche sirène,
Flotte dans le calme bleu éthéréen,
Ouvrant ses yeux purs — qui sont des astres —
Et pleure de longues larmes tranquilles,
Des larmes de lumière, tremblant un peu,
Dans la paix dormante de l’eau
Où les navires à l’amarre
Sont des fantômes de navires,
Si pâlement profilés sur le ciel ;
On dirait d’une très ancienne estampe
Effacée à moitié par le temps.

Un charme indolent vaporisa les contours ;
Et les formes sont de tendres spectres
Revêtus de passé, de mystère et de rêve,
Au gré de notre désir incertain.