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chemin, dont la position étoit singulière. Dès que je la vis un peu moins souffrante, je pris avec moi deux hommes du pays, et nous nous dispersâmes pour aller à sa recherche. Après une demi-heure de marche, je le trouvai qui se hâtoit d’arriver : il s’étoit égaré. Je lui dis combien Valérie avoit souffert ; il en fut extrêmement fâché. Quand nous fûmes près d’arriver à la maison de poste, je me mis à courir de toutes mes forces pour annoncer le comte et pour être le premier à donner cette bonne nouvelle. J’eus un moment bien heureux en voyant tout le bonheur de Valérie. Je retournai alors vers le comte, et nous entrâmes ensemble ; Valérie se jeta à son cou. Elle pleuroit de joie ; mais, l’instant d’après, paroissant se rappeler tout ce qu’elle avoit souffert, elle gronda le comte, lui dit qu’il étoit impardonnable de l’avoir exposée à toutes ces inquiétudes, de l’avoir quittée sans lui rien dire ; elle repoussoit son mari, qui vouloit l’embrasser. « Oui, il est impardonnable, dit-elle, d’écouter son ressentiment. — Mais je n’étois pas fâché, lui dit-il. — Comment ! vous n’étiez pas fâché ? — Non, ma chère Valérie, soyez-en sûre ; je voulois éviter une explication. Je sais que vous êtes vive, que cela vous fait mal ; je sais aussi combien vous vous apaisez facilement : vous êtes si bonne, Valérie ! » Elle avoit les larmes aux yeux ; elle prit sa main d’une manière touchante. « C’est moi qui ai tort, dit-elle ; je vous en demande bien pardon. Comment ai-je pu me fâcher d’un mot qui