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ce qui te paroît si simple, si naturel ; mais au moins laisse-moi ma reconnoissance comme un de mes premiers plaisirs, si ce n’est comme un de mes premiers devoirs, et n’oublions jamais le rocher où nous retournâmes après cette nuit, et d’où nous regardions la mer en remerciant le Ciel de notre amitié.

Adieu, Ernest ; il est tard, et nous partons de grand matin.


LETTRE II


Luben, le 20 mars.

Ernest, plus que jamais elle est dans mon cœur, cette secrète agitation qui tantôt portoit mes pas sur les sommets escarpés des Koullen, tantôt sur nos désertes grèves. Ah ! tu le sais, je n’y étois pas seul : la solitude des mers, leur vaste silence ou leur orageuse activité, le vol incertain de l’alcyon, le cri mélancolique de l’oiseau qui aime nos régions glacées, la triste et douce clarté de nos aurores boréales, tout nourrissoit les vagues et ravissantes inquiétudes de ma jeunesse. Que de fois, dévoré par la fièvre de mon cœur, j’eusse voulu, comme l’aigle des montagnes, me baigner dans un nuage et renouveler ma vie ! Que de fois j’eusse voulu