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que les secrets désirs des classes possédantes, est devenue le fondement de tout un système de philosophie pratique, qui s'est emparé des esprits des gens cultivés et de ceux qui ne le sont pas, et qui réagit, comme le fait toujours la philosophie pratique, sur la philosophie théorique de notre siècle.

Il est vrai que le formidable accroissement de la puissance productrice de l'homme dans le domaine industriel, depuis qu'il a dompté la vapeur et l'électricité, a quelque peu ébranlé la doctrine de Malthus. La richesse industrielle s'est accrue avec une rapidité à laquelle ne peut être comparé aucun accroissement de population, et elle peut s'accroître bien plus rapidement encore. Mais l'agriculture est toujours considérée comme le boulevard de la pseudo-philosophie malthusienne. Les récents progrès de l'agriculture et de l'horticulture ne sont pas suffisamment connus ; et alors que nos jardiniers défient le climat et la latitude, acclimatent les plantes sub-tropicales, font plusieurs récoltes par an au lieu d'une seule et créent eux-mêmes le sol dont ils ont besoin pour chaque espèce de culture, les économistes n'en continuent pas moins à dire que la surface du sol est limitée, et encore plus sa puissance de production ; ils soutiennent toujours qu'une population qui doublerait tous les trente ans se verrait bientôt exposée à une disette des produits nécessaires à la vie.