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nombrables petites fermes qui cultivent le blé de la même façon qu'on le cultive en Europe, c'est-à-dire en fumant la terre. Mais ces fermes ont un mode de production mieux organisée et des facilités de vente, et elles ne sont pas dans la nécessité de payer au propriétaire un impôt d'un tiers, ou plus, du prix de vente de chaque hectolitre de blé. Là est toute la différence.

Cependant ce ne fut qu'après que j'eus fait moi-même une excursion dans les prairies du Manitoba en 1897, que je pus comprendre pleinement la justesse des vues ci-dessus exposées. Les 6 à 8 millions d'hectolitres qu'exportait alors chaque année le Manitoba étaient presque entièrement produits dans des fermes d'une ou deux « quarter-sections », c'est-à-dire de 65 à 130 hectares. L'exportation a beaucoup augmenté depuis, mais les fermes conservent les mêmes dimensions. Le labourage y est fait par les procédés ordinaires : et, dans l'immense majorité des cas, les fermiers achètent les moissonneuses-lieuses en s'associant par groupes de quatre. La batteuse est louée par le fermier pour un ou deux jours chez un homme spécial qui voyage avec sa machine ; la paille est brûlée sur place, après quoi le fermier transporte son blé à l'« elevator » avec ses propres chevaux, pour le vendre tout de suite ou pour l'y laisser en dépôt, s'il n'a pas immédiatement besoin d'argent et s'il espère en retirer un prix plus élevé un mois ou deux plus tard.