Page:Kropotkine - Mémoires d’un révolutionnaire.djvu/373

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CINQUIÈME PARTIE
LA FORTERESSE — L’ÉVASION




Chapitre premier


LA FORTERESSE DE PIERRE ET PAUL. — MA CELLULE. — EXERCICES DE GYMNASTIQUE. — MON FRÈRE ALEXANDRE ACCOURT À MON AIDE. — J’OBTIENS LA PERMISSION D’ÉCRIRE. — MES LECTURES. — MONOTONIE DE LA VIE DE PRISON. — ARRESTATION DE MON FRÈRE. — RELATIONS SECRÈTES AVEC MES CO-DÉTENUS. — UNE VISITE DU GRAND DUC NICOLAS.


C’était donc là la terrible forteresse dans laquelle avait péri pendant les deux derniers siècles tout ce qui faisait la vraie force de la Russie, et dont le nom à Pétersbourg n’était prononcé qu’à voix basse.

C’était là que Pierre Ier avait torturé son fils Alexis et qu’il l’avait tué de sa propre main ; là que la princesse Tarakanova fut enfermée dans une cellule qui s’emplit d’eau à la suite d’une inondation, de sorte que les rats grimpaient sur elle pour ne pas se noyer ; là que le terrible Minich torturait ses ennemis, et que Catherine II fit enterrer vivants ceux qui lui reprochaient d’avoir assassiné son mari. Et depuis le règne de Pierre Ier,