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la lâcheté, fit de tout temps la force des oppresseurs ; dans les sociétés humaines primitives, il fut habilement exploité par les prêtres et les chefs militaires, perpétuant les coutumes avantageuses pour eux seuls, qu’ils réussissaient à imposer aux tribus.

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Tant que cet esprit de conservation, habilement exploité, suffisait pour assurer l’empiètement des chefs sur la liberté des individus ; tant que les seules inégalités entre les hommes étaient les inégalités naturelles et qu’elles n’étaient pas encore décuplées et centuplées par la concentration du pouvoir et des richesses, il n’y avait encore aucun besoin de la loi et de l’appareil formidable des tribunaux et des peines toujours croissantes pour l’imposer.

Mais lorsque la société eut commencé à se scinder de plus en plus en deux classes hostiles, l’une qui cherche à établir sa domination et l’autre qui s’efforce de s’y soustraire, la lutte s’engagea. Le vainqueur s’empresse d’immobiliser le fait accompli, il cherche à le rendre indiscutable, à le transformer en institution sainte et vénérable par tout ce que les vaincus peuvent respecter. La Loi fait apparition, sanctionnée par le prêtre et ayant à son service la massue du guerrier. Elle travaille à