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indiquées par le peuple. Le métier de bladier (trafiquant de blé) devenait des plus dangereux.

À Paris, la question de nourrir 600.000 bouches devenait tragique ; car si le pain était resté à six sous la livre, comme il le fut un moment, c’eût été un soulèvement certain, et alors la mitraille, seule, aurait pu empêcher le pillage des riches. Aussi, la Commune, s’endettant de plus en plus envers l’État, dépensait de 12.000 jusqu’à 75.000 livres par jour pour livrer la farine aux boulangers et maintenir le pain au prix de douze sous les quatre livres. Le gouvernement, de son côté, fixait la quantité de grain que chaque département et chaque canton devait envoyer à Paris. Mais les routes étaient en mauvais état, et les bêtes de trait étaient réquisitionnées pour la guerre.

Tous les prix montaient en proportion. Une livre de viande, qui coûtait jadis cinq ou six sous, se vendait maintenant vingt sous ; le sucre était à quatre-vingt-dix sous la livre, une chandelle se payait sept sous.

On avait beau sévir contre les agioteurs : cela n’aidait à rien. Après l’expulsion des Girondins, la Commune avait obtenu de la Convention la fermeture de la Bourse de Paris (27 juin 1793) ; mais la spéculation continuait, et l’on voyait les spéculateurs, portant un accoutrement spécial, se réunir au Palais-Royal et marcher en bandes, avec des filles, narguant la misère du peuple.

Le 8 septembre 1793, la Commune de Paris, poussée à bout, fit mettre les scellés chez tous les banquiers et « marchands d’argent ». Saint-Just et Lebas, envoyés en mission par la Convention dans le Bas-Rhin, ordonnaient au tribunal criminel de faire raser la maison de