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naire qui, d’un coup de plume, abolissait la propriété communale en France, en privant de tous droits sur les terres communales ceux qu’on appelait les habitants, ou les Ansässigen.

Nous comprenons parfaitement la fureur que ce décret dut provoquer en France, dans la fraction pauvre des populations rurales. Il fut compris comme l’ordre de partager les terres communales entre les citoyens actifs, et seulement les « citoyens », à l’exclusion des « habitants » et des pauvres. C’était la spoliation à l’avantage du bourgeois de village[1]. À lui seul, ce décret, avec son paragraphe 3, aurait suffi pour soulever toute la Bretagne paysanne.

Déjà, le 8 septembre 1792, un rapport était lu à la Législative pour constater que l’exécution de ce décret rencontrait tant d’obstacles dans la population qu’il était impossible de l’appliquer. Mais rien ne fut fait. La Législative se sépara sans l’avoir abrogé. Ce ne fut fait qu’en octobre, par la Convention.

Vu les difficultés d’application, la Convention décida d’abord (décret du 11-13 octobre 1792) que « les communaux en culture continueront jusqu’à l’époque du partage à être cultivés et ensemencés comme par le passé, suivant les usages des lieux ; et les citoyens qui auront les dites cultures et semences jouiront des récoltes provenant de leurs travaux. » (Dalloz, IX, 186.)

Tant que les Girondins dominaient la Convention, il n’était pas possible de faire davantage. Il est fort

  1. C’est ainsi que ce décret fut interprété par les tribunaux et qu’il doit l’être. (Voyez, par exemple, Dalloz, X, p. 265, no 2261, note.)