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La plupart des historiens sympathiques à la Révolution, lorsqu’ils arrivent à la lutte tragique qui s’engagea en 1793 entre la Montagne et la Gironde, s’appesantirent trop, ce me semble, sur un des aspects secondaires de cette lutte. Ils attachent, j’ose le dire, trop d’importance au soi-disant fédéralisme des Girondins.

Il est vrai qu’après le 31 mai, lorsque les insurrections girondines et royalistes éclatèrent dans plusieurs départements, le mot « fédéralisme » devint, dans les documents de l’époque, le principal chef d’accusation des Montagnards contre les Girondins. Mais ce mot, devenu un mot d’ordre, ou un signe de ralliement, n’était, au fond, qu’un cri de guerre, bon pour accuser le parti que l’on combattait. Comme tel, il fit fortune. Cependant, en réalité, comme l’avait déjà remarqué Louis Blanc, le « fédéralisme » des Girondins consistait surtout dans leur haine de Paris, dans leur désir d’opposer la province réactionnaire à la capitale révolutionnaire. « Paris leur faisait peur ; là fut tout leur fédéralisme », dit Louis Blanc (liv. VIII et ch. IV).

Ils détestaient et craignaient l’ascendant que la Commune de Paris, les comités révolutionnaires, le peuple de Paris, avaient pris dans la Révolution. S’ils parlèrent de transporter le siège de l’Assemblée législative, et plus tard de la Convention, dans une ville de province, ce n’était pas par amour de l’autonomie provinciale. C’était uniquement pour placer le corps législatif