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priété au pied des statues que l’on promenait dans une fête ; jusqu’à embrasser Danton, lorsqu’il dit dans la première séance de la Convention : « Déclarons que toutes les propriétés, territoriales, individuelles et industrielles, seront éternellement respectées. » À ces paroles le Girondin Kersaint lui sautait au cou, en disant : « Je me repens de vous avoir appelé ce matin un factieux. » Ce qui voulait dire : « Puisque vous promettez de respecter les propriétés bourgeoises, passons sur votre responsabilité dans les massacres de septembre ! »

Tandis que les Girondins voulaient organiser ainsi la république bourgeoise et poser les bases de l’enrichissement de la bourgeoisie, sur le modèle donné par l’Angleterre après sa révolution de 1648, les Montagnards, ou, du moins, le groupe des Montagnards qui prit pour un moment le dessus sur la fraction modérée, représentée par Robespierre, esquissaient déjà à grands traits les fondations d’une société socialiste — n’en déplaise à ceux de nos contemporains qui en réclament à tort la priorité. Ils voulaient, d’abord, abolir jusqu’aux derniers vestiges de la féodalité, puis niveler les propriétés, détruire les grandes propriétés foncières, donner la terre à tous, jusqu’aux plus pauvres cultivateurs, organiser la distribution nationale des produits de première nécessité, estimés à leur juste valeur et, au moyen de l’impôt, manié comme une arme de combat, faire la guerre à outrance au « commerçantisme », — à cette race de riches agioteurs, banquiers, commerçants, chefs d’industrie, qui se multipliait déjà dans les villes.

Ils proclamaient en même temps, dès 1793, « le droit