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municipalité, surveillée par les sans-culottes, la Société populaire de l’endroit, l’assemblée primaire, les hommes à piques représentaient maintenant la force nouvelle de la France.

Tout l’aspect du pays, tout l’esprit des populations, — le langage, les mœurs, les idées, avaient été changés par la révolution. Une nouvelle nation était née, et, pour l’ensemble des conceptions politiques et sociales, elle différait du tout au tout de ce qu’elle avait été il y a à peine douze mois !

Et cependant l’ancien régime restait encore debout. La royauté existait toujours et représentait une force immense, autour de laquelle la contre-révolution ne demandait qu’à se rallier. On vivait sous le provisoire. Rendre à la royauté sa puissance d’autrefois, c’était évidemment un rêve insensé, auquel ne croyaient plus que les fanatiques de la Cour. Mais la force de la royauté pour le mal restait toujours immense. S’il lui était impossible de rétablir le régime féodal, — que de mal pouvait-elle faire tout de même aux paysans affranchis, si, reprenant le dessus, elle allait, dans chaque village, disputer aux paysans les terres et les libertés qu’ils avaient prises ! C’est d’ailleurs ce que le roi et bon nombre de Feuillants (monarchistes constitutionnels) se promettaient de faire dès que le parti de la Cour aurait eu raison de ceux qu’ils appelaient « les Jacobins ».

Quant à l’administration, nous avons vu que dans les deux-tiers des départements, et même dans Paris, l’administration départementale et celle des districts étaient contre le peuple, contre la Révolution ; elles se seraient accommodées de n’importe quel simulacre de constitu-