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France – planait sur tout ce qui vivait et sentait, et cet esprit, produit de millions de volontés, donnait l’inspiration qui nous manque dans les temps ordinaires.

Mais après avoir signalé les beaux effets de l’enthousiasme qu’une révolution seule pouvait inspirer, l’historien doit aussi jeter un regard calme, et dire jusqu’où alla l’enthousiasme, et quelle limite il n’osa pas franchir, signaler ce qu’il donna au peuple, et ce qu’il refusa de lui accorder.

Un trait général suffira pour indiquer cette limite. L’Assemblée ne fit que sanctionner en principe et généraliser ce que le peuple avait accompli lui-même dans certaines localités. Elle n’alla pas plus loin.

Souvenons-nous de ce que le peuple avait déjà fait à Strasbourg et dans tant d’autres villes. Il avait soumis, nous l’avons vu, tous les citoyens, nobles et bourgeois, à l’impôt, et proclamé l’impôt sur le revenu : l’Assemblée accepta cela en principe. Il avait aboli toutes les charges honorifiques — et les nobles vinrent y renoncer le 4 août : ils acceptaient l’acte révolutionnaire. Le peuple avait aussi aboli les justices seigneuriales et nommé lui-même ses juges par élection : l’Assemblée l’accepta à son tour. Enfin, le peuple avait aboli les privilèges des villes et les barrières provinciales — c’était fait dans l’Est — et maintenant l’Assemblée généralisa en principe le fait, déjà accompli dans une partie du royaume.

Pour les campagnes, le clergé admit en principe que la dîme fût rachetée ; mais, en combien d’endroits le peuple ne la payait plus du tout ! Et quand l’Assemblée exigera bientôt qu’il la paie jusqu’en 1791, ce sera à la