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trente mille hommes de Besenval, campés sur le Champ de Mars ; et à l’est, elle avait pour appui les tours de la Bastille, dont les canons étaient braqués sur le faubourg révolutionnaire de Saint-Antoine et sa rue principale, ainsi que sur cette autre grande artère, la rue Saint-Antoine, qui mène à l’Hôtel de Ville, au Palais-Royal et aux Tuileries. L’importance de la Bastille n’était ainsi que trop évidente, et dès le matin du 14, disent les « Deux Amis de la Liberté », « ces mots : À la Bastille ! volaient de bouche en bouche d’une extrémité de la ville à l’autre[1]. »

Il est vrai que la garnison de la Bastille ne comptait que 114 hommes, dont 84 invalides et 30 Suisses, et que le gouverneur n’avait rien fait pour l’approvisionner ; mais cela prouve seulement que la possibilité d’une attaque sérieuse de la forteresse était repoussée comme absurde. Cependant le peuple savait que les conspirateurs royalistes comptaient sur la forteresse, et il apprit par les habitants du quartier que des provisions de poudre avaient été transportées dans la nuit du 12 au 13, de l’arsenal à la Bastille. On s’aperçut aussi que le commandant, le marquis de Launey, avait déjà mis, dès le matin du 14, ses canons en position, pour pouvoir tirer sur le peuple s’il se portait en masse vers l’Hôtel de Ville.

  1. Déjà dans plusieurs cahiers, les électeurs avaient demandé « que la Bastille s’écroule et s’abîme ». (Cahiers des Halles ; aussi ceux des Mathurins, des Cordeliers, du Sépulcre, etc., cités par Chassin, Les Élections et les cahiers de Paris, t. II, p.449 et suiv.) Les électeurs avaient raison, puisque, lors de l’affaire Réveillon, l’ordre avait été donné d’armer la Bastille. Aussi, dans la nuit du 30 juin, on parla déjà de s’emparer de cette forteresse. (Récit de l’élargissement… des gardes-françaises, cité par Chassin, p. 452, note.)