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en octobre, chaque année depuis trois ans, près de 50 livres de raisin d’un goût exquis. La récolte provient d’un cep de vigne, âgé de six ans[1]. Et l’abri est si mauvais qu’il pleut à travers. La nuit, la température y est toujours celle du dehors. Il est évident qu’on ne le chauffe pas, autant vaudrait chauffer la rue ! Et les soins à donner sont : la taille de la vigne, pendant une demi-heure par an, et l’apport d’une brouette de fumier que l’on renverse au pied du cep, planté dans l’argile rouge en dehors de l’abri.

Si l’on évalue, d’autre part, les soins excessifs donnés à la vigne sur les bords du Rhin ou du Léman, les terrasses construites pierre à pierre sur les pentes des coteaux, le transport du fumier et souvent de la terre à une hauteur de deux à trois cents pieds, on arrive à la conclusion qu’en somme, la dépense de travail nécessaire pour cultiver la vigne est plus considérable en Suisse ou sur les bords du Rhin qu’elle ne l’est sous verre, dans les faubourgs de Londres.

Cela peut paraître paradoxal au premier abord, parce que l’on pense généralement que la vigne pousse d’elle-même dans le midi de l’Europe et que le travail du vigneron ne coûte rien. Mais les jardiniers et les horticulteurs, loin de nous démentir, confirment nos assertions. « La culture la plus avantageuse en Angleterre est la culture de la vigne », dit un jardinier pratique, le rédacteur du Journal d’Horticulture anglais. Les prix d’ailleurs, ont, on le sait, leur éloquence.

Traduisant ces faits en langage communiste, nous

  1. La vigne elle-même représente les recherches patientes de deux ou trois générations de jardiniers. C’est une variété de