Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/206

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des propriétaires d’esclaves. Quant aux esclaves eux-mêmes, ils savent ce qu’il vaut : ils en connaissent les motifs.


D’ailleurs, qui donc, sinon les économistes, nous enseigna que, si le salarié s’acquitte tant bien que mal de sa besogne, un travail intense et productif ne s’obtient que de l’homme qui voit son bien-être grandir en proportion de ses efforts ? Tous les cantiques entonnés en l’honneur de la propriété se réduisent précisément à cet axiome.

Car, — chose remarquable, — lorsque des économistes, voulant célébrer les bienfaits de la propriété, nous montrent comment une terre inculte, un marais ou un sol pierreux se couvrent de riches moissons sous la sueur du paysan-propriétaire, ils ne prouvent nullement leur thèse en faveur de la propriété. En admettant que la seule garantie pour ne pas être spolié des fruits de son travail soit de posséder l’instrument de travail, — ce qui est vrai, — ils prouvent seulement que l’homme ne produit réellement que lorsqu’il travaille en toute liberté, qu’il a un certain choix dans ses occupations, qu’il n’a pas de surveillant pour le gêner et qu’enfin, il voit son travail lui profiter, ainsi qu’à d’autres qui font comme lui, et non pas à un fainéant quelconque. C’est tout ce que l’on peut déduire de leur argumentation, et c’est ce que nous affirmons aussi.

Quant à la forme de possession de l’instrument de travail, cela n’intervient qu’indirectement dans leur démonstration pour assurer au cultivateur que personne ne lui enlèvera le bénéfice de ses produits ni de ses améliorations. — Et pour appuyer leur thèse en faveur de la propriété contre toute autre forme de