Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/174

Cette page a été validée par deux contributeurs.

D’autres socialistes répudient le phalanstère. Mais quand on leur demande comment pourrait s’organiser le travail domestique, ils répondent : Chacun fera « son propre travail ». « Ma femme s’acquitte bien de celui de la maison : les bourgeoises en feront autant. » Et si c’est un bourgeois socialisant qui parle, il jette à sa femme, avec un sourire gracieux : « N’est-ce pas, chérie, que tu te passerais bien de servante dans une société socialiste ? Tu ferais, n’est-ce pas, comme la femme de notre vaillant ami Paul, ou celle de Jean, le menuisier, que tu connais ? »

A quoi la femme répond, avec un sourire aigre-doux, par un « Mais oui, chéri » tout en se disant à part soi, que, heureusement, cela ne viendra pas de sitôt.

Servante, ou épouse, c’est encore et toujours sur la femme que l’homme compte pour se décharger des travaux du ménage.

Mais la femme aussi réclame — enfin — sa part dans l’émancipation de l’humanité. Elle ne veut plus être la bête de somme de la maison. C’est déjà assez qu’elle doive donner tant d’années de sa vie à élever ses enfants. Elle ne veut plus être la cuisinière, la ravaudeuse, la balayeuse du ménage ! Et les Américaines, prenant les devants dans cette œuvre de revendication, c’est une plainte générale aux États-Unis sur le manque de femmes se complaisant aux travaux domestiques. Madame préfère l’art, la politique, la littérature, ou le salon de jeu ; l’ouvrière en fait autant, et on ne trouve plus de servantes. Elles sont rares, aux États-Unis, les filles et les femmes qui consentent à accepter l’esclavage du tablier.


Et la solution vient, dictée par la vie elle-même,