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ils contribueront tous à explorer les couches terrestres ; tous apporteront leur part de recherches. Dix mille observateurs au lieu de cent feront plus en une année qu’on en fait de nos jours en vingt ans. Et lorsqu’il s’agira de publier les divers travaux, dix mille hommes et femmes, versés dans les différents métiers, seront là, pour dresser les cartes, graver les dessins, composer le texte, l’imprimer. Joyeusement, tous ensemble, ils donneront leurs loisirs, en été à l’exploration, en hiver au travail de l’atelier. Et lorsque leurs travaux auront paru, ils ne trouveront plus cent lecteurs seulement : ils en trouveront dix mille, tous intéressés à l’œuvre commune.

C’est d’ailleurs la marche du progrès qui nous indique cette voie.

Aujourd’hui même, quand l’Angleterre a voulu se donner un grand dictionnaire de sa langue, elle n’a pas attendu qu’il naquît un Littré pour consacrer sa vie à cette œuvre. Elle a fait appel aux volontaires, et mille personnes se sont offertes spontanément et gratuitement, pour fouiller les bibliothèques, et terminer en peu d’années un travail auquel la vie entière d’un homme n’aurait pas suffi. Dans toutes les branches de l’activité intelligente, le même esprit se fait jour ; et il faudrait bien peu connaître l’humanité pour ne pas deviner que l’avenir s’annonce dans ces tentatives de travail collectif, en lieu et place du travail individuel.

Pour que cette œuvre fût vraiment collective, il aurait fallu l’organiser de manière à ce que cinq mille volontaires, auteurs, imprimeurs et correcteurs eussent travaillé en commun ; mais ce pas en avant a été fait, grâce à l’initiative de la presse socialiste qui nous offre déjà des exemples de travail manuel et intellec-